Dans un monde où l’image de soi et l’opinion des autres notamment en matière d’apparence physique ont une importance primordiale, le poids devient une préoccupation majeure, en particulier pour la nouvelle “génération selfie” fortement influencée par des standards de beauté sans cesse renouvelés. À la poursuite d’un idéal prôné par les médias, le cinéma ou encore la publicité, ces personnes sont, dans leur quête de bien être et de reconnaissance sociale, particulièrement exposées aux dérives du “maigrir à tout prix” qui peut parfois les mener jusqu’à l’anorexie. Si cette pathologie connaît une croissance exponentielle et que bon nombre de personnes sont désormais animées par une peur phobique de grossir, cela s’explique entre autres par un changement de comportement alimentaire dans la société. En effet, la restauration rapide s’est au fil des années imposée comme un incontournable des pratiques de consommations occidentales, emmenant l’obésité à s’installer confortablement au point de devenir aujourd’hui un véritable problème de santé publique à l’échelle mondiale. De nombreux gouvernements ont dû réagir, notamment au travers de campagnes nationales de sensibilisation incitant tout un chacun à pratiquer une activité physique régulière.
Sur les trente dernières années, les statistiques sont ainsi passées de 860 millions à quelques 2 milliards d’individus concernés par ce problème, souvent considéré à tort comme l’apanage des pays riches uniquement. Pourtant, la question commence à soulever de sérieuses interrogations auprès des institutions et gouvernements africains, au vu du nombre de cas d’obésité recensés sur le continent, même si les statistiques correspondantes sont encore loin de celles enregistrées dans les pays développés. En effet, alors qu’en 1980, moins de 20% de la population africaine souffraient de surpoids et 5% d’obésité, plus d’un tiers du continent est aujourd’hui concerné par des problématiques de surpoids et 10% par l’obésité. À titre comparatif, l’Amérique du Nord compte environ 70% d’adultes en situation de surpoids et le taux de personnes obèses y est supérieur à 30%. Cette croissance galopante sur le continent africain est imputable à plusieurs facteurs, dont l’urbanisation et les changements alimentaires qui s’en suivent. Selon une étude menée par l’Institut de Recherche pour le Développement en Afrique de l’ouest, les nouveaux citadins incorporent à leur alimentation des produits riches en sucres et en sel, consomment plus de viande, de matières grasses et de pâtes. Associée à l’absence d’activités sportives, cela entraîne inévitablement une prise de poids. Autre explication et non des moindres, l’aspect culturel. Le surpoids est considéré par certaines populations africaines comme un signe de richesse ou de bonne santé. Ainsi, Il n’est pas inhabituel de voir des femmes adapter leur alimentation dans le but de développer des rondeurs, répondant aux critères locaux de beauté.
Face à ce fléau, plusieurs institutions tirent la sonnette d’alarme pour sensibiliser les populations aux méfaits de l’obésité sur la santé, notamment au regard de l’accroissement de la sédentarisation et de l’urbanisation des populations africaines. Cette occidentalisation du mode de vie pourrait y faire augmenter de façon spectaculaire le nombre de personnes en surcharge pondérale au cours des prochaines décennies. Ces prévisions préoccupantes sont corroborées par l’Institut de Santé Ougandais selon lequel, les maladies cardiaques liées à l’obésité pourraient représenter la première cause de mortalité en Afrique à l’horizon 2020.
Afin d’enrayer ce phénomène, les autorités sanitaires préconisent une alimentation équilibrée mais aussi la pratique d’une activité physique régulière et, à l’instar des pays occidentaux, l’on observe une multiplication des campagnes de sensibilisations aux bienfaits du sport un peu partout sur le continent. Ces initiatives sont d’autant plus louables que selon les résultats d’une analyse publiée dans le British Medical Journal, l’exercice physique quotidien serait bénéfique pour la santé et, pour peu qu’il soit suffisant, contribuerait à réduire de 20% le risque de développer cinq maladies mortelles que sont que les cancers du côlon et du sein, le diabète, les Accidents Vasculaires Cérébraux et certaines maladies cardiaques.
Souhaitant apporter leur pierre à cet édifice, plusieurs entrepreneurs africains ont choisi de contribuer à la lutte contre l’obésité en développant des solutions mobiles, au rang desquelles Truppr et BoxChamp, deux applications ayant pour vocation de faciliter et d’encourager la pratique d’activités physiques.
Truppr facilite la création de communautés de sportifs dans les villes africaines
Passionné de sport d’équipes, Bosun Tijani, concepteur de Truppr, affectionne tout particulièrement ces activités à caractère social, lui permettant en plus d’effectuer les efforts physiques nécessaires au maintien d’une forme physique satisfaisante. Son activité professionnelle l’obligeant à de nombreux déplacements, il lui était difficile de trouver des personnes avec lesquelles il pouvait pratiquer ses sports favoris dans les différentes villes du Nigéria où il se rendait. Comme lui, des millions de personnes dans le monde préfèrent pratiquer l’exercice physique en groupe, du fait de la motivation procurée par la présence d’autres personnes et du sentiment d’appartenance que peuvent expérimenter les individus réunis autour d’un objectif commun. C’est donc partant de ce postulat que Bosun a conçu Truppr, une plateforme destinée aux amoureux de sports et de fitness désireux de trouver des personnes partageant leur passion dans les villes où ils se rendent.
Ouverte aux sportifs de tous niveaux, Truppr offre une palette variée d’épreuves sportives : balade à vélos, VTT, danse, football, roller, tennis de table, volleyball, etc. En outre, Truppr offre la possibilité aux utilisateurs de se regrouper par thématique : perte de poids, challenge d’abdos, boissons saines, etc. Sur la plateforme, il est également possible de communiquer de façon privée avec d’autres utilisateurs ou des entraîneurs.

Avec Truppr, l’utilisateur peut sauvegarder ses performances et depuis sa dernière mise à jour, l’application réalise un classement de ses abonnés en fonction du nombre de points acquis, dépendamment des pratiques sportives de chacun. Les utilisateurs peuvent ainsi se voir attribuer les niveaux “Neo”, “Elite”, “Turbo”, “Knight”, “Centurion” et “Zeus” en fonction de leur fréquence d’activités physiques.
Autre fonctionnalité offerte par la plateforme, la possibilité d’organiser ou de rejoindre des événements sportifs amateurs ayant lieu autour de soi et même de gérer la billetterie (collecte d’argent et gestion des participants) mise en place lors de ces événements, tout cela depuis son mobile.
Lancée en 2014 à Lagos et incubée au Co-Creation Hub (CcHub), Truppr est disponible dans le monde entier et revendique aujourd’hui plus de 5000 utilisateurs mensuels. Afin de mieux fédérer sa communauté, Truppr organise le “Truppr RUN”, un marathon mensuel de 5 km regroupant simultanément des milliers de personnes dans plusieurs villes du Nigéria du Kenya. Les meilleurs temps réalisés sont alors récompensés de cadeaux offerts par des sponsors de l’événement.

BoxChamp, l’ingénieuse rencontre de la technologie et du sport
BoxChamp de son coté est une application mobile sud-africaine, qui, à l’instar de Truppr nourrit l’ambition de faciliter la pratique du sport sur le continent africain. Mise au point en janvier 2015 par Mark FAWZY, BoxChamp est une plateforme destinée aux salles de sports et à leurs abonnés. L’application permet en outre aux gérants de ces salles, principalement de CrossFit (pour Cross Fitness) d’automatiser leurs tâches administratives. Cette méthode d’entraînement physique qui croise la force athlétique, la gymnastique, l’haltérophilie et les sports d’endurance compte aujourd’hui près de 4 millions de pratiquants dans le monde. Les entraînements basés sur des exercices exécutés à très haute intensité doivent être sauvegardés et classés pour encourager la compétition entre membres de clubs. Pourtant jusqu’ici, il existait très peu d’outils permettant de centraliser la gestion administrative et opérationnelle tout en suivant l’évolution des affiliés. C’est ainsi que Mark FAWZY décida de mettre au point BoxChamp, un outil interactif permettant à chaque sportif d’échanger avec son coach, définir ses exercices, gérer son alimentation ou encore programmer ses entraînements. L’administrateur a quant à lui a la possibilité de gérer les finances de la salle de sport, interagir avec ses clients et suivre leur progression.

L’outil « tout-en-un » de la startup a déjà séduit plusieurs opérateurs de salles de CrossFit à travers le monde. Un succès qui s’explique par le fait que la plupart des outils présents sur le marché ne proposaient pas d’offres combinées, étant généralement conçus soit pour suivre les performances des athlètes ou pour servir uniquement à la gestion des salles. BoxChamp, qui a obtenu un premier gros contrat à Dubaï compte désormais s’exporter partout dans le monde en visant dans un premier temps le Royaume-Uni, Singapour, l’Australie et les Emirats arabes unis. Mais pour financer ce développement et mettre en place la structure capable de la soutenir, la jeune pousse jusqu’ici autofinancée est à la recherche d’investissements, d’autant plus qu’elle voit des concurrents apparaître sur son marché. En effet, sur les 13000 salles de CrossFit affiliées à BoxChamp, 2300 sont également clientes de WODIFY son principal concurrent. Toutefois, Mark FAWZY se dit tout à fait de taille pour tenir tête à la concurrence sur ce marché en pleine croissance.
Avec l’essor de la pratique du sport dans bon nombre de sociétés africaines, Truppr et BoxChamp pourraient à terme jouer un rôle déterminant dans la santé des populations et la lutte contre l’obésité. Couplé aux nombreux traqueurs d’activités qui sont en train d’émerger sur le marché, ces populations seraient les premiers bénéficiaires de la mise en place d’outils résultants d’une approche technologique de la sensibilisation à la pratique sportive.